Du levain dans la pâte !

TÉMOIGNAGE

DU LEVAIN DANS LA PATE !

Sur les funérailles de Laurence Labranche,
1re communauté néoctéchuménale de la paroisse Saint-Jean-Baptiste-de-la-Salle,
diocèse de Québec
Avril 1982

Lundi de Pâques. Funérailles de ma meilleure amie. Un événement … Laurence et moi cheminions ensemble depuis une bonne dizaine d’années. Nous nous étions connues en participant à la préparation de messes d’enfants. Je me souviens qu’une de nos premières préoccupations avait été la sincérité, parce qu’on ne peut pas tromper des enfants …

C’est dans la sincérité que s’est approfondie notre amitié. L’équipe des messes d’enfants est devenue l’équipe de liturgie, s’est élargie en équipe d’étude de la Bible (la belle époque …) Il y a eu aussi les téléphones (longs, elle parlait beaucoup…!), les promenades en ski ou à pied, les échanges sur tout et sur rien …

Puis, il y a eu le néo-catéchuménat. C’est elle qui m’en a parlé la première fois, mais c’est moi qui ai suivi la première catéchèse qui s’est donnée dans notre paroisse (en même temps que son mari, d’ailleurs). Et je ne me suis pas sentie capable de répondre à cet appel exigeant; j’ai décroché avant la convivence et l’engagement solennel. Elle, a suivi la deuxième catéchèse et n’a pas décroché … Avec son mari, elle était même devenue catéchète et j’en ai entendu parler avec éloges par des gens qui l’ont entendue.

Elle ne parlait plus que de ça, ne vivait plus que de ça. Elle était d’un enthousiasme … qui me faisait mal, à moi qui ne me sentais pas capable de suivre. Je devenais méchante. Je me disais: c’est bien beau, la communauté, la parole, les célébrations intenses: ils sont le levain de la pâte, mais pour le moment, le levain est dans le sous-sol et la pâte toute seule dans l’église. Je l’ai fuie pendant un temps. Puis elle a compris ma détresse et, au moment même où la maladie prenait le dessus sur elle, nous avons été de nouveau sur la même longueur d’ondes.

Et aujourd’hui, à ses funérailles, j’ai com­pris. Les néo-catéchumènes de différen­tes communautés sont venus «célébrer» la mort et la résurrection du Christ. Ils étaient environ soixante-quinze, je crois, dont dix des onze célébrants, si je ne m’abuse. Ils ont chanté avec fougue ces étranges chants un peu trop hispaniques pour nous, peut-être, mais si envoûtants. Et ils ont prié. Mais surtout, ils nous ont présenté la Parole de façon telle qu’il n’y avait pas moyen de la fuir: elle se faisait accrochante, concrète, près de nos préoccupations, de notre peine qui devenait joie …

J’ai compris que Laurence avait fait un beau bout de chemin dans le néo-catéchuménat et que le Seigneur lui avait fait une grande grâce en la prépa­rant ainsi à Le rencontrer.

J’ai compris aussi que le Seigneur n’est pas pressé et qu’il sait choisir le moment pour mettre le levain dans la pâte. Mais j’ai bien envie de lui demander de se dépêcher…

Louise Perrin
Pastorale Québec, 19 juillet 1982